
L’anxiété est une émotion universelle qui joue un rôle essentiel dans notre survie : elle nous alerte face aux dangers potentiels et prépare notre corps à réagir. Pourtant, lorsqu’elle devient excessive, envahissante et incontrôlée, elle peut se transformer en un véritable cercle vicieux, perturbant profondément le quotidien. Ce phénomène, à la fois physique et psychique, alimente un enchaînement de réactions qui renforcent l’angoisse et favorisent l’évitement des situations perçues comme menaçantes. Quels sont les mécanismes de cette boucle infernale ? Comment l’anxiété peut-elle devenir un trouble et quelles stratégies permettent de l’apaiser ? Cet article explore les rouages de l’anxiété et propose des pistes pour mieux la comprendre et la surmonter.
Ou la boucle infernale
Quelle est son utilité ?
L‘anxiété (aussi appelée angoisse) est une émotion et comme toute émotion, elle a son utilité. Son expression nous permet de détecter et de faire face aux situations de danger. Palpitation, augmentation du rythme respiratoire, tension musculaire… Le corps est en alerte et prêt à en découdre.
« Jusque là, tout va bien ! » me direz vous
Et vous avez parfaitement raison, sauf que l’anxiété peut apparaître sans raison apparente et ce, de manière incontrôlée et répétée.
Oui, c’est un peu plus embêtant maintenant !
Les symptômes :
Le pire dans cette histoire, c’est que l’anxiété se renforce à chaque apparition. Pour comprendre comment tout ça fonctionne, commençons par les symptômes physiques.
Comme évoqué précédemment, le but de l’anxiété est de préparer le corps à affronter un danger. De ce fait, palpitations, tremblements, nœud dans l’estomac ou la gorge apparaissent. Avec ça, vertiges, maux de tête, sensation de serrement dans la poitrine et d’autres symptômes peuvent se manifester.
Mais que serait le physique sans le psychique ?
Les complications :
Puisque le corps réagit, l’esprit aussi et ce dernier va s’aligner. Il développe alors peur, angoisse d’un danger imminent et pas forcément identifié. Le phénomène va s’entretenir et s’intensifier : « si je respire aussi vite, c’est qu’il y a un problème (renforcement), je suis en train de faire une crise cardiaque (renforcement), personne ne pourra m’aider et je vais mourir c’est sûr (renforcement) ». Au fur et à mesure des manifestations physiques, l’individu se focalise de plus en plus sur ses symptômes, ce qui aura tendance à les amplifier, on parle alors de crise d’anxiété. Alors, dans un élan de bravoure et pour faire redescendre la pression, le cerveau développe automatiquement une stratégie complétement foireuse, j’ai nommé : La Fuite… Et ça fonctionne !
« Bah alors, où est le problème ? »
L’évitement et la fuite :
Le problème c’est que la situation reste enregistrée dans la mémoire comme responsable de cette crise d’anxiété (cf conditionnement). L’inconscient déduit que les réactions physiques et psychologiques étaient adaptées et ont permis d’éviter le pire. Le comportement est donc sauvegardé et sera utilisé à nouveau dans une situation similaire. Rappelons que dans une situation dangereuse, cette réaction serait parfaitement adaptée. Mais dans le cadre d’une crise d’anxiété, il n’en est rien. Après quoi, l’individu évitera les situations similaires afin d’éviter de ressentir à nouveau ce phénomène. Si la situation est évitée, l’hypothèse de la présence d’un danger ne peut être infirmée et la crise d’anxiété s’installe.
Il existe d’autres stratégies visant à faire disparaître l’anxiété et qui, au contraire, l’amplifie :
🔹Les compulsions :
mentales (compter jusqu’à 100) ou comportementales (toucher trois fois la poignet de porte), elles visent à diminuer l’anxiété par des actes stéréotypés et ritualisés.
🔹Les conduites contraphobiques :
affrontement des situations accompagné d’une personne ou d’un objet (porte-bonheur, bombe lacrymogène…).
🔹Les autres conduites :
consommation de substances psychoactives (addictions), demande constante de réassurance, vigilance exacerbée jusqu’au moindre détail.
Pour résumer et illustrer tout ça, voici la modélisation de l’anxiété selon Ducher (2011) :
Rassurez-vous ! Il y a beaucoup de flèches, mais ce n’est pas si compliqué
« Donc, c’est notre perception du monde qui va tout déclencher ? »
Oui, c’est exactement ça !
Explications du modèle de l’anxiété de Ducher (2011) :
Comme expliqué dans ce modèle, l’une des solutions pour court-circuiter l’anxiété réside dans l’interprétation. Dans le cas où celle-ci est positive, l’anxiété va diminuer jusqu’à disparaître « Ok, ce n’est pas un tueur avec du sang sur lui, c’est simplement le boucher ».
Si elle est négative, la crise d’anxiété débute : « Cette secousse de l’ascenseur indique clairement qu’il a un problème, il va tomber en panne et je vais rester coincé pendant plusieurs heures ». En cas d’interprétation catastrophique, c’est l’attaque de panique : « Le plancher de mon appartement ne fait que de craquer, c’est vrai qu’il est très vieux. Il va s’effondrer et je serai à l’intérieur, je vais me retrouver coincé dans les débris pendant plusieurs jours, le temps que les pompiers me trouvent. J’en sortirai handicapé et j’aurai perdu toutes mes affaires, meuble et vêtements… Ma vie sera foutue ».
Toutes ces cognitions (dialogue interne) sont amplifiées par le stress, ne sont pas forcément conscientes et le fait de les mettre en lumière sera le premier objectif de la psychothérapie.
L’anxiété est au centre de différents troubles
🔹Trouble obsessionnel compulsif (TOC) :
Anxiété provoqué par des pensées intrusives et qui sera apaisée par des actes spécifiques (aligner tous les stylos sur le bureau, éteindre et allumer 6 fois la lumières…)
🔹Trouble de stress post traumatique (TSPT) :
Reviviscence d’un évènement traumatisant déclenchant de l’anxiété.
🔹Phobie sociale :
Anxiété au sujet du regard et du jugement des autres.
🔹Agoraphobie :
Anxiété à l’idée qu’un problème survienne dans un lieu ou une situation donnée.
🔹Phobie spécifique :
Anxiété spécifique à un déclencheur (situation, objet…).
🔹Trouble panique :
Attaque de panique à répétition et anxiété à l’idée d’en faire une, ou la peur d’avoir peur.
🔹Trouble anxieux généralisé (TAG) :
Anxiété permanente au sujet de l’avenir en général.
Les conséquences de l’anxiété vont bien au delà de son expression puisqu’elle provoque l’évitement des situations anxiogènes. L’individu victime adapte sa vie à son anxiété « Sachant qu’il pourrait m’arriver un problème dans les transports publics, je vais au travail à pied, même si ça me prend 1h30 ».
« Ok, le sport c’est bon pour la santé, mais c’est peut-être un peu excessif là »
Les conséquences :
Oui, sachant en plus que l’anxiété monopolise les pensées et le corps lorsqu’elle apparaît. Elle utilise les ressources physiologiques et cognitives. L’épuisement est donc inévitable. à partir de là, c’est la porte ouverte à l’impulsivité, l’irritabilité, l’impatience… Bref, tout ce qu’il faut pour être heureux !
Parlons du plus intéressant :
Comment ça se soigne :
Comme abordé précédemment, la première étape va être de cibler les cognitions déclenchant l’anxiété. Celle-ci sont propres à une situation, un contexte, un objet, qu’il sera nécessaire de déterminer. On neutralise les pensées, on ajoute une exposition graduelle à l’objet anxiogène, on saupoudre de techniques de relaxation, on mélange le tout et voilà, c’est prêt !
Cette démarche peut se faire seul et pour ça, voici quelques techniques de relaxation qui vous seront utiles (ici, ici et ici)
Néanmoins, l’accompagnement par un.e professionnel.le (psychologue, psychothérapeute, psychiatre) est encouragé.
Alors ?! Quand est-ce qu’on se voit ? => Contact
Bibliographie :
- Ducher, Jean-Luc (2011). Un schéma général de l’anxiété. , 21(3), 79–83. doi:10.1016/j.jtcc.2011.07.008
- Grillon, C. (2008). Models and mechanisms of anxiety: evidence from startle studies.
Psychopharmacology, 199(3), 421-437.
- Le Gall, A. (1995). L’anxiété et l’angoisse. FeniXX.
- Marius, F. (2020). Etude de la symptomatologie paranoïaque au coeur d’un environnement virtuel : Validation de vidéos à 360° dans la population schizophrène. (Unpublished master’s thesis). Université de Liège, Liège, Belgique. Retrieved from https://matheo.uliege.be/handle/2268.2/9291
- Mathews, A. (1990). Why worry? The cognitive function of anxiety. Behaviour Research and Therapy, 28(6), 455–468.
- Palazzolo, J. (2019). De l’anxiété normale à l’anxiété pathologique. Le Journal des psychologues, (7), 72-77.
- Salkovskis, P. M. (1991). The importance of behaviour in the maintenance of anxiety and panic: a cognitive account. Behavioural Psychotherapy, 19(1), 6–19.
- Servant, D. (2022). Gestion du stress et de l’anxiété. Elsevier Health Sciences.
- Widlöcher, D. (2002). Dépression et anxiété. Revue française de psychanalyse, 66(2), 409-422.
FAQ
Qu’est-ce que l’anxiété et à quoi sert-elle ?
L’anxiété est une émotion normale qui sert à alerter le corps et l’esprit d’un danger potentiel. Elle déclenche des réactions physiologiques (palpitations, tension musculaire, respiration accélérée) pour préparer une réponse rapide.
Pourquoi l’anxiété peut-elle devenir un problème ?
L’anxiété devient problématique lorsqu’elle apparaît sans raison apparente, de manière excessive et répétée, générant un cercle vicieux où les symptômes s’autoalimentent. Elle peut entraîner des crises d’angoisse, des évitements et une détresse importante au quotidien.
Comment se développe une crise d’anxiété ?
Une crise d’anxiété repose sur un enchaînement de réactions :
- Symptômes physiques (palpitations, sueurs, vertiges).
- Interprétation négative du corps et de l’environnement (« Je vais avoir une crise cardiaque »).
- Amplification des sensations par la peur, menant à une crise d’angoisse.
- Fuite ou évitement de la situation, renforçant l’association anxiété = danger.
Quels sont les comportements qui aggravent l’anxiété ?
- Fuite et évitement : éviter certaines situations empêche de réaliser qu’elles ne sont pas réellement dangereuses.
- Compulsions : rituels pour se rassurer (taper trois fois sur une table, vérifier constamment quelque chose).
- Conduites contraphobiques : chercher du réconfort dans un porte-bonheur ou une personne.
- Consommation de substances (alcool, tabac, médicaments, drogues) pour calmer l’angoisse.
Quels sont les principaux troubles liés à l’anxiété ?
- TOC (Trouble Obsessionnel Compulsif) : pensées intrusives apaisées par des rituels.
- Trouble de stress post-traumatique (TSPT) : reviviscence d’un traumatisme.
- Phobie sociale : peur du regard et du jugement des autres.
- Agoraphobie : peur des espaces ouverts ou bondés.
- Phobies spécifiques : peur intense face à un objet ou une situation précise.
- Trouble panique : crises de panique récurrentes et peur de leur survenue.
- Trouble anxieux généralisé (TAG) : inquiétudes constantes et excessives.
Pourquoi l’anxiété épuise autant ?
L’anxiété mobilise en permanence les ressources physiques et cognitives. Cela entraîne une fatigue chronique, de l’irritabilité, des troubles du sommeil et une difficulté à se concentrer.
Comment se débarrasser de l’anxiété ?
- Travailler sur les pensées anxieuses : reconnaître et modifier les interprétations catastrophiques.
- Exposition progressive : s’exposer progressivement aux situations anxiogènes pour désamorcer la peur.
- Techniques de relaxation : respiration profonde, méditation, cohérence cardiaque.
- Accompagnement professionnel : thérapies cognitivo-comportementales (TCC), psychothérapie, voire médication si nécessaire.
Peut-on guérir complètement de l’anxiété ?
L’anxiété est une réaction normale du corps, mais lorsqu’elle devient excessive, elle peut être régulée grâce à un travail sur les pensées et comportements. Avec le bon accompagnement, il est possible de retrouver une vie sereine et de mieux gérer ses émotions.
MARIUS François Psychologue et Hypnothérapeute Moulins 03000